Un peu d'histoire...

Les conditions de vie des meuniers :

Elles ont été difficiles sous l'ancien régime, malgré les critiques dont ils ont été l'objet.
Bridés par la banalité et les conditions draconniennes des baux, les meuniers se sont livrés à une concurrence qui a souvent réduit leurs profits.

Du XIIè siècle à 1800, le taux de mouture a été immuablement fixé à 1/16e.
Toutes les tentatives d'augmenter leurs revenus se sont heurtées au refus des propriétaires des moulins.
L'échevinage d'Arras avait en partie donné raison aux meuniers en leur accordant une augmentation de deux livres, mais cette décision ne pouvait qu'être contestée par les gros propriétaires de moulins comme l'abbaye Saint-Vaast parce que les moines se sont toujours opposés à l'augmentation des revenus de leurs meuniers.

Jusqu'à la révolution la plupart des meuniers étaient payés en nature, système qui leur procurait des bénéfices substentiels lorsque les céréales étaient chères.
Les meuniers préferaient être payés en grains plutôt qu'en farine, car 10 sacs de grains donnent 11 sacs de farine.
Les contestations ont été nombreuses avec ce mode de rémunération employé jusqu'au XIXè siècle, même si le paiement en argent s'était de plus en plus développé depuis le XIVè.
Régulièrement des mesures ont dû être prises par les autorités devant les plaintes des usagers des moulins.
La réputation des meuniers était souvent mauvaise car certains trichaient sur la quantité de farine en ne la tassant pas dans la mesure.
Certains dictons sont restés : "le meunier est un vole-farine", "tu peux changer de meunier, tu ne changera pas de voleur", que dit le meunier avec son tic-tac?, vole pour moi, n'oublie pas l'âne".
Mais malgré cette réputation, aucun meunier n'est devenu riche avec cette seule activité; beaucoup ont dû compléter avec l'exploitation d'une petite ferme.
Quelques clients privilégiés payaient moins cher l'usage du moulin, comme les boulangers, les officiers seigneuriaux et royaux.
La plupart des propriétaires ne payaient rien pour la mouture, ils étaient aussi prioritaires lorsqu'ils voulaient moudre.

Les jours et les heures :

Le vent :

Le meunier a d'abord besoin de vent pour faire marcher son moulin.
Pour cette raison, il lui est difficile de le quitter.
Le vent peut faiblir ou augmenter à tout moment.
Le meunier est un peu comme le marin des champs, un moulin à vent se conduit comme un bateau en se servant du vent.
L'habitation du meunier est toujours près du moulin pour mieux le surveiller.
La nuit, le meunier ne dort que d'un oeil, si le vent est bon, il faut en profiter.
Certains meuniers installent une clochette dehors qui tinte avec le vent.

La recherche des clients :

Le meunier ne travaille pas seul dans son moulin.
Les archives mentionnent des mouleurs, des chasse-manées, des gardes moulins, des valets de moulin.
Le meunier travaille souvent aidé de sa femme.
Le premier travail consiste à aller chercher le grain, il est confié au chasse-manée.
Le transport est assuré par des ânes ou des mulets.
Souvent ce transport est payé en supplément de la mouture.
Lorsque les clients habitent à côté du moulin, ce sont eux qui amènent leur grain.

Si les gens du village apportent eux-mêmes leur grain à moudre, les gros clients plus lointains ne viennent pas tous au moulin.
Mais, pour s'assurer de la régularité du travail, certains accompagnent le chasse-manée.
En général, les clients n'apportent le grain que par petite quantité, au fur et à mesure de leurs besoins et pour éviter les charançons.

Les sacs pour la farine sont en toile de jute blanche avec des rayures rouges et bleues.
Ils sont très étroits et font jusqu'à 1,70m de haut.
Les sacs remplis sont attachés avec un noeud de meunier.
Le sac se plie en deux comme une besace, il peut peser jusqu'à 80kg.
Si le transport s'effectue en charrette ou à dos d'âne ou de mulet avec un bât, toutes les manipulations de chargement et de déchargement se font à dos d'homme.
Les meuniers tiennent à transporter eux-mêmes la farine pour éviter de trop la tasser.
Chaque meunier a son territoire, tradition issue de la banalité, il peut atteindre 7 à 8km autour du moulin.
Si le meunier à eau peut prévoir la date de livraison de la farine, il n'en est pas de même pour le meunier à vent.
D'autre part, les chemins, mal entretenus, sont souvent impraticables.